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NT-ProBNP ou BNP ? Lequel choisir ?

Auteur(s) : D Collin-Chavagnac, D Jacques, M Perrin, M Rabilloud, M Manchon , Laboratoire de biochimie, Centre Hospitalier Lyon Sud, Pierre Bénite, Service de réanimation médicale, Centre Hospitalier Lyon Sud, Pierre Bénite, Service de biostatistiques des Hospices Civils de Lyon, Lyon.

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Résumé : Le rôle diagnostique et pronostique du BNP et du NT-proBNP chez les patients insuffisants cardiaques est maintenant bien établi. Le problème auquel tout biologiste est confronté au sein de son laboratoire, est de choisir l’un des deux marqueurs en fonction de son équipement. Le but de cette étude a été de comparer les résultats du dosage du BNP Biosite Triage et du NT-proBNP Dade Behring par rapport à la clinique. Cent douze patients (âge moyen 76 ± 13 ans) consultant pour dyspnée aiguë ont été inclus, divisés en trois groupes en fonction de la clinique : les patients indemnes d’insuffisance cardiaque aiguë (groupe I, n \= 50), les patients présentant une dyspnée non cardiaque avec antécédents d’insuffisance cardiaque (groupe II, n \= 22) et les patients présentant une dyspnée d’origine cardiaque (groupe III, n \= 40). Les patients présentant une dyspnée d’origine cardiaque ont un niveau plus élevé de BNP (740 pg/mL versus 84 pg/mL \; p <\; 0,001) et de NT-proBNP (7 502 pg/mL versus 499 pg/mL \; p <\; 0,001) que les patients présentant une dyspnée non cardiaque. Les courbes ROC pour le BNP et le NT-proBNP chez les patients avec insuffisance cardiaque aiguë (groupe III) comparés aux patients présentant une dyspnée non cardiaque (groupe II + I, n \= 72) ne diffèrent pas de façon significative (AUC \= 0,927 versus AUC \= 0,930, p \= 0,90). Il en est de même lorsque l’on compare les patients du groupe III et les patients du groupe I : AUC \= 0,981 versus AUC \= 0,975, p \= 0,76. Dans le cadre du diagnostic d’insuffisance cardiaque aiguë chez un patient dyspnéique les dosages de BNP et de NT-proBNP sont d’intérêt équivalent. Au niveau praticabilité, la méthode BNP Biosite est plus rapide car l’analyse est réalisée sur sang total. Concernant les performances analytiques, la précision de la technique automatisée NT-proBNP Dade Behring est nettement meilleure (CV proche de 3 %) et est fortement recommandée pour le suivi du traitement des patients insuffisants cardiaques.

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Annales de Biologie Clinique, Volume 64, Numéro 3, 275-80, Mai-Juin 2006, Pratique quotidienne

Sérologie de Lyme

Qu'est-ce que la maladie de Lyme ? 

La maladie de Lyme est une infection dûe à une bactérie : Borrelia burgdorferi, qui se transmet par la morsure de certains types de tiques.

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Chez les humains, la maladie de Lyme peut entraîner des symptômes graves, mais elle peut être traitée efficacement par antibiothérapie. Il s'agit de la maladie à tranmission vectorielle la plus répendue dans les régions tempérées. Elle sévit en Asie, dans une grande partie de l'Amérique du Nord (Canada et états limitrophes) mais également en Europe et plus particulièrement en Alsace où de nombreux foyers existent.

Image de gauche : Tique gorgée de sang et tique sans repas sanguin de pris

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Image de droite : Erythème diffu caractéristique de la maladie de Lyme.

Diagnostic biologique selon l'INVS :

Sérologies 

Les IgM spécifiques apparaissent entre 2 et 4 semaines après la morsure de tique ; leur taux sérique présente un pic entre les 6ème et 8èmes semaines puis diminue entre 4 et 6 mois.

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Les IgG spécifiques apparaissent entre 6 et 8 semaines, parfois plus tardivement ; puis, leur taux sérique diminue très lentement ou persiste au fil des années. Ainsi, au cours des 4 à 5 semaines suivant une morsure de tique, la sérologie est inutile mais prend toute sa valeur au bout de 6 semaines, face à un tableau clinique évocateur.

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Une sérologie positive ne permet pas de différencier une infection active d'une infection ancienne(traitée ou non) ou asymptomatique. Elle peut rester positive après un traitement antibiotique surtout s'il est institué tardivement. Une sérologie positive ne signe pas systématiquement une infection active mais reflète souvent un contact antérieur avec des Borrelia.

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En l’absence de manifestations cliniques évocatrices, elle ne constitue donc pas en soi une indication de traitement. Dans le cas d’une neuroborréliose, la sérologie sanguine est fréquemment positive mais, son titre restant peu élevé, elle doit être couplée à la recherche d’anticorps dans le LCR. Dans les formes tertiaires, la réponse sérologique est forte. Cependant, l’interprétation du résultat sérologique reste difficile :

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  • une sérologie faussement négative peut s’observer au début de l’infection cutanée, en cas de formation de complexes immuns ou de traitement précoce limitant la production d'anticorps

  • une sérologie faussement positive peut être liée à une réaction croisée avec d’autres microorganismes, notamment d’autres spirochètes (syphilis), ou à une maladie auto-immune

D-Dimères : Intérêt du dosage.

Intérêt du dosage des D-Dimères dans le diagnostic d'exclusion de l'embolie pulmonaire

Auteur(s) : C. Lecourvoisier, P. Toulon, Laboratoire d'hématologie, Hôpital Cochin, 27, rue du Fbg-Saint-Jacques, 75679 Paris cedex 14, France.

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Résumé : Le diagnostic d'embolie pulmonaire, et plus généralement de maladie thromboembolique veineuse, reste difficile et ne peut que rarement être posé sur le seul examen clinique. Il est donc, le plus souvent, nécessaire d'avoir recours à des examens complémentaires d'imagerie lourds et parfois invasifs. De très nombreuses études ont démontré que le dosage des D-dimères, des produits de dégradation spécifiques de la fibrine, pouvait être un paramètre très performant pour exclure le diagnostic d'embolie pulmonaire, en cas de taux inférieur à une valeur seuil. Si la technique de référence dans cette indication reste la méthode Elisa, elle est peu utilisée en pratique courante, compte tenu de ses contraintes de réalisation. Des méthodes plus rapides et aussi performantes fondées sur différents principes (dérivés de l'Elisa ou agglutination de microparticules de latex dans la plupart des cas), ont été développées, qui sont plus adaptées au dosage unitaire et à l'urgence. Certaines ont été validées par de nombreuses études cliniques, avec un seuil d'exclusion pouvant être variable selon les trousses, mais fixé dans la plupart des cas à 500 ng/mL. La détermination de cette valeur seuil (cut-off) est fondamentale, et celle-ci paraît être différente en fonction des trousses diagnostiques, voire en fonction de l'environnement technique de chaque laboratoire. Elles ont une très bonne sensibilité (proche de 100 %), ainsi qu'une excellente valeur prédictive négative (supérieure à 98 %). Le dosage des D-dimères s'inscrit donc aujourd'hui dans une stratégie diagnostique multidisciplinaire de l'embolie pulmonaire, en amont des examens d'imagerie (sauf en cas d'une forte probabilité clinique), permettant ainsi d'en limiter la prescription. Enfin, il est à noter que le développement et la commercialisation de nombreuses trousses de dosage a permis de mettre en évidence un certain manque de standardisation, et de stigmatiser la nécessité d'études clinico-biologiques pour valider les performances de chaque test et pour définir la valeur seuil au-dessous de laquelle il est possible d'exclure un diagnostic d'embolie pulmonaire.

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Mots-clés : Embolie pulmonaire ? Thrombose veineuse profonde ? D-dimères ? Exclusion ? Diagnostic.

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Illustrations

Article

Le diagnostic de la maladie thromboembolique veineuse, qui regroupe thromboses veineuses profondes et embolies pulmonaires, est souvent difficile à poser en pratique médicale courante [1, 2]. On estime qu'en France, la seule embolie pulmonaire pourrait concerner près de 100 000 patients par an, et être directement ou indirectement responsable de 10 000 à 20 000 décès. Mais ces chiffres, obtenus par extrapolation de données statistiques américaines [3, 4], restent approximatifs, car il n'existe pas de réelles données épidémiologiques françaises. Il s'agit donc d'une pathologie grave qui peut concerner toutes les catégories de patients qu'ils soient hospitalisés ou ambulatoires. Ne pouvant être porté uniquement sur l'examen clinique, son diagnostic implique le recours à des examens complémentaires d'imagerie lourds (et parfois invasifs) tels que l'angioscanner, l'angiographie ou la scintigraphie, le plus souvent associés à un Doppler des membres inférieurs. Il requiert donc un matériel coûteux et un personnel spécialisé, pas toujours disponible 24 h/24 dans tous les établissements de soins. De plus, la réalisation de plusieurs examens peut être nécessaire pour exclure avec certitude le diagnostic d'embolie pulmonaire ou à l'inverse pour le confirmer, justifiant alors l'instauration d'un traitement anticoagulant efficace. Il est à noter que le diagnostic d'embolie pulmonaire n'est confirmé aux termes de l'exploration que chez moins d'un tiers des patients ambulatoires admis dans un service d'urgence [5, 6]. C'est pourquoi depuis plusieurs années de nombreux travaux ont porté sur le développement de tests biologiques non invasifs permettant de confirmer ou au contraire d'infirmer le diagnostic d'embolie pulmonaire et plus généralement de maladie thromboembolique veineuse. La plupart ont concerné des marqueurs d'activation de la coagulation et surtout de la fibrinolyse, en particulier les D-dimères, des produits de dégradation spécifiques de la fibrine. Si aucun marqueur biologique positif fiable de thrombose n'a pu être identifié, l'intérêt du dosage des D-dimères pour exclure un diagnostic d'embolie pulmonaire a été clairement démontré [7].

Les D-Dimères

La thrombine générée lors de l'activation de la coagulation clive la molécule de fibrinogène entraînant, après libération de deux petits peptides (FPA et FPB), la génération de monomères de fibrine qui se polymérisent ensuite (caillot soluble). La stabilisation du caillot (caillot insoluble) est sous la dépendance du facteur XIII, dont la forme activée est une transglutaminase qui permet la liaison (cross-link) des molécules de fibrine impliquées par l'intermédiaire de leurs domaines D [8]. L'activation du système fibrinolytique va ensuite entraîner, via la génération de plasmine, une lyse du thrombus constitué. L'action protéasique de la plasmine sur la fibrine aboutit à la libération de nombreux fragments de clivage de taille variable dont les D-dimères qui apparaissent relativement tardivement par rapport au processus initial thrombotique. Il s'agit néanmoins d'un ensemble de produits de dégradation hétérogène sur le plan biochimique. Il est à noter que la plasmine est également capable de cliver le fibrinogène, ainsi que d'autres facteurs de la coagulation lors d'une activation pathologique du système fibrinolytique. Les produits issus de la dégradation du fibrinogène ou de la fibrine sont regroupés sous le terme générique de PDF (produits de dégradation de la fibrine/fibrinogène). Les D-dimères ne sont donc que le reflet d'une lyse par la plasmine de molécules de fibrine polymérisées ayant subi l'action du facteur XIIIa [9].

Méthodes de dosage des D-dimères et utilisation

Le dosage des D-dimères est réalisé, le plus souvent sur plasma, par des méthodes immunologiques, fondées sur l'utilisation d'anticorps monoclonaux reconnaissant différents épitopes présents uniquement sur les dimères de fragments D. Ces néo-antigènes sont absents de la molécule de fibrinogène native, des produits de dégradation du fibrinogène, ou des monomères solubles de fibrine [9]. Ils présentent donc une bonne spécificité analytique (absence de réaction croisée), mais les D-dimères n'étant que le résultat d'une activation de la fibrinolyse secondaire à l'activation de la coagulation, leur taux plasmatique n'est pas associé à une bonne spécificité diagnostique. En effet, des taux élevés de D-dimères peuvent être retrouvés dans de nombreuses situations cliniques au cours desquelles une activation de la fibrinolyse succède à une activation de la coagulation (tableau 1). Il faut donc distinguer les situations où l'activation de la coagulation reste localisée (par exemple : thrombose veineuse ou artérielle, embolie pulmonaire...), des cas où elle est plus généralisée (par exemple : coagulation intravasculaire disséminée (CIVD) aiguë du choc septique...). Cette différence aura une importance sur le choix du test à utiliser pour leur dosage. En cas d'activation systémique, les taux de D-dimères sont généralement très élevés et une méthode de dosage semi-quantitative, telle que l'agglutination sur lame de particules de latex, peut être parfaitement suffisante. Il n'en est pas de même dans les cas d'activation plus localisée de la coagulation, où un dosage quantitatif et très sensible sera indispensable. Ce point est particulièrement important dans le contexte de l'exclusion d'un diagnostic d'embolie pulmonaire, ou plus généralement de maladie thromboembolique veineuse. Pour être utilisable dans cette indication, une technique doit donc non seulement être très sensible dans la zone de concentrations normales de D-dimères et très performante au voisinage de la valeur seuil (reproductibilité...) mais également être validée par des études cliniques bien menées [10]. Ces points précis ont d'ailleurs fait l'objet d'une mise au point récente (27 mars 2001) de l'Agence française de sécurité sanitaire des produits de santé (Afssaps).

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Même si elles constituent toujours les techniques de référence (gold standard), les techniques Elisa (enzyme linked immunosorbent assay) conventionnelles présentent peu d'intérêt en routine, compte tenu de leurs contraintes de réalisation techniques (temps de réalisation, non adapté au dosage unitaire...). Aussi, et pour répondre à une demande croissante, de nouveaux tests rapides, fondés sur différents principes, ont été développés et commercialisés au cours de ces dernières années (tableau 2). Parmi ceux-ci, un test proche de l'Elisa classique (Elfa : enzyme linked fluorescent assay), mais automatisé donc plus rapide (résultat rendu en moins de 35 minutes) et adapté aux dosages unitaires, le Vidas® D-Dimer (bioMérieux, Marcy-l'Étoile), a fait l'objet de très nombreuses évaluations qui ont conclu à son intérêt dans le diagnostic d'exclusion de l'embolie pulmonaire [11-14]. Il est actuellement très utilisé en pratique courante, avec une valeur seuil de 500 ng/mL. Néanmoins, la plupart des trousses commercialisées aujourd'hui sont fondées sur le principe de l'agglutination de microbilles de latex recouvertes par un anticorps monoclonal (tableau 2). Celles-ci paraissent présenter une sensibilité satisfaisante dans le contexte du diagnostic de l'embolie pulmonaire, contrairement aux tests de macro-agglutination qui ne sont que semi-quantitatifs et uniquement utilisables dans le contexte d'une activation majeure de la coagulation (CIVD par exemple). La plupart de ces tests d'agglutination de microbilles de latex sont automatisables sur les principaux automates d'hémostase (habituellement ceux du même fournisseur). Leurs principaux intérêts résident dans leur rapidité d'exécution (quelques minutes), dans leur automatisation sur le même analyseur que les bilans standard d'hémostase, voire dans leur coût plus faible que l'Elisa. Dans des études préliminaires, ces techniques semblent avoir, dans le diagnostic d'exclusion de l'embolie pulmonaire, des performances comparables à celles des techniques Elisa [11-15]. Néanmoins, et à l'exception du STA®-Liatest® D-Di (Diagnostica Stago, Asnières) qui a fait l'objet de plusieurs études [12-14], le manque d'études cliniques rétrospectives regroupant de grandes cohortes de patients pourrait encore freiner l'éventuelle utilisation des ces nouveaux tests dans cette indication. De plus, les performances analytiques de certains de ces tests mériteraient d'être optimisées au voisinage de la valeur seuil [14].

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Il existe également sur le marché des tests fondés sur des principes très différents et adaptés au dosage unitaire. On peut citer les tests sur carte fondés sur l'immunofiltration comme le NycoCard (Nycomed Pharma) ou le SimplifyTM D-dimer (AGEN Biomedical), l'Instant IA D-dimer (Diagnostica Stago) n'étant plus commercialisé (tableau 2). Schématiquement, le plasma ou le sang total à tester est déposé sur une membrane filtrante en présence d'une solution contenant un anticorps monoclonal anti-D-dimère couplé à des particules d'or. Après migration chromatographique sur cette membrane, le complexe est révélé par « capture » grâce à un second anticorps immobilisé. Ces tests donnent un résultat en 5 à 10 minutes, mais ne sont que semi-quantitatifs (résultats inférieurs ou supérieurs à une valeur seuil fixée par le fabricant), avec une certaine imprécision de lecture variable en fonction de l'observateur [16, 17]. Enfin, il convient de citer une technique de dosage réalisable sur sang total (SimpliRed®, AGEN Biomedical) qui fait appel à une technique d'agglutination des hématies autologues. La mise en évidence des D-dimères est réalisée par un réactif (conjugué) couplé à deux anticorps : le premier se fixant sur les hématies (sans entraîner d'agglutination), le second spécifique des D-dimères. En cas de taux élevé de D-dimères dans le sang, le complexe D-dimères-conjugué formé se fixera sur les hématies par le premier anticorps entraînant ainsi leur agglutination macroscopique. Facilement réalisable, le résultat peut être obtenu en 2 minutes. Les performances de ce test dans le contexte du diagnostic de l'embolie pulmonaire, sont variables selon les études [18-21], mais semblent néanmoins inférieures à celles des tests rapides quantitatifs

Intérêt du dosage des D-dimères dans l'exclusion du diagnostic d'embolie pulmonaire

Le dosage des D-dimères s'intègre donc aujourd'hui dans la stratégie diagnostique de l'embolie pulmonaire et plus généralement de la maladie thromboembolique veineuse. Seul un taux faible de D-dimères, c'est-à-dire inférieur à la valeur seuil (résultat souvent interprété à tort comme « négatif ») peut être interprété, et permet d'exclure le diagnostic d'embolie pulmonaire. La valeur prédictive négative du taux des D-dimères dosé par une technique sensible est généralement supérieure à 98 %. Par manque de spécificité (cf. plus haut), un taux élevé de D-dimère, c'est-à-dire supérieur à la valeur seuil (résultat souvent interprété à tort comme « positif ») ne peut être utilisé comme un argument en faveur d'un processus thromboembolique aigu. Compte tenu des nombreuses circonstances pouvant être à l'origine d'une élévation des D-dimères chez des patients hospitalisés (tableau 1), ce dosage présente un intérêt essentiellement chez les patients ambulatoires. Cependant, il ne peut être utilisé seul, impliquant par là même une prise en charge globale du patient, et une approche multidisciplinaire du diagnostic faisant intervenir en collaboration cliniciens, biologistes et radiologues.

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De nombreux algorithmes décisionnels [22-26] intègrent donc le dosage des D-dimères aux côtés d'examens d'imagerie tels que la scintigraphie pulmonaire de ventilation ou de ventilation et de perfusion, l'angioscanner, ou l'angiographie pulmonaire qui est plus invasive. Dans la plupart des cas, le dosage des D-dimères figure en amont de ces examens, qui ne seront prescrits qu'en cas de taux de D-dimères supérieur à la valeur seuil définie (figure 1). En cas de forte probabilité clinique, les examens d'imagerie sont, en revanche, prescrits d'emblée, pour optimiser la prise en charge du patient. Une telle stratégie diagnostique est appliquée en routine dans de nombreux centres hospitaliers qui ont maintenant un recul important sur la prise en charge multidisciplinaire de l'embolie pulmonaire [22-26].

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Compte tenu de ses contraintes, la technique de référence (Elisa) n'est pas utilisable en pratique courante pour le diagnostic d'exclusion de l'embolie pulmonaire. Aussi, depuis quelques années, les études de validation clinique ont essentiellement porté sur des méthodes de dosage rapides. Celles-ci ont permis d'en préciser l'intérêt et de définir les valeurs seuils permettant d'exclure le diagnostic d'embolie pulmonaire. Si un dosage est classiquement considéré comme « négatif » lorsque le résultat est inférieur à 500 ng/mL [27], cette limite dépend du réactif utilisé. En effet, si cette valeur de 500 ng/mL a été parfaitement validée pour le Vidas® D-Dimer, elle reste discutée pour les autres techniques. À titre d'exemple, selon une étude récente [13] portant sur 222 patients suspects d'embolie pulmonaire, le STA®-Liatest® D-Di est très bien corrélé (r = + 0,952, p < 0,0001) au Vidas® D-Dimer et à l'Elisa classique. Par extrapolation de la courbe de corrélation, la valeur seuil de 500 ng/mL (Vidas® D-Dimer) correspondrait à 0,46 mug/mL avec le STA®-Liatest® D-Di, ce qui pose le problème du choix de la valeur seuil. Les études cliniques paraissent donc absolument nécessaires afin de définir le seuil d'exclusion d'un réactif. Par ailleurs, selon les trousses utilisées, la spécificité et/ou la réactivité des anticorps est variable, d'où une variabilité importante des performances diagnostiques, éventuellement influencées par la population de patients étudiés [28]. À côté de la spécificité de l'anticorps monoclonal utilisé et du seuil décisionnel, l'expression des résultats constitue un autre facteur de variabilité important et particulièrement l'unité dans laquelle est exprimé le résultat. En effet, certains fournisseurs expriment leurs résultats (étalonnent leur trousse) en « équivalant fibrinogène », d'autres en quantité de D-dimère. Par ailleurs, si certains industriels recommandent différents seuils selon les automates pour un même réactif (par exemple : Dade Behring), d'autres laissent à chaque laboratoire la liberté de le fixer...

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Il est à noter que les performances analytiques de certains tests mériteraient d'être améliorées dans la zone critique, afin que leur utilisation en routine soit envisagée sereinement [14]. Enfin, en ce qui concerne les tests sensibles sur lame ou sur carte (tableau 2), si les travaux initiaux avaient conclu à d'excellentes performances dans l'exclusion du diagnostic d'embolie pulmonaire, les études ultérieures réalisées après leur introduction en routine font apparaître des performances en retrait, éventuellement opérateur-dépendants [17, 20].

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Enfin, les différences de populations de patients analysés dans les études pourraient probablement être responsables, au moins en partie, des variations observées dans les performances des tests. L'âge est un élément indiscutable d'élévation du taux de D-dimères, et au-delà d'une certaine limite (70 ou 80 ans, selon les auteurs), les performances du dosage sont nettement diminuées. Si certains auteurs recommandent d'adapter la valeur seuil à l'âge du patient [29], cette attitude ne fait pas l'objet d'un consensus, et la plupart des travaux suggèrent de ne pas utiliser le dosage des D-dimères chez les sujets âgés de plus de 70 ans [30-32]. Cela diminue d'autant l'intérêt du dosage dans cette tranche âgée de la population, qui présente souvent en plus d'autres facteurs de morbidité susceptibles d'entraîner une élévation des D-dimères. Par ailleurs, plusieurs études [33, 34] menées dans une population de patients hospitalisés versus une population de patients ambulatoires permettent également de nuancer les résultats des différents tests utilisés. Ainsi, le dosage des D-dimères chez les patients hospitalisés et cliniquement suspects d'embolie pulmonaire est souvent moins informatif que chez les patients ambulatoires compte tenu des multiples facteurs pouvant augmenter leur taux plasmatique (tableau 1). De plus, en période postopératoire les taux de D-dimères étant souvent très élevés, ce paramètre ne devrait pas être mesuré dans cette indication. Il en est de même pour la grossesse qui s'accompagne physiologiquement d'une augmentation relative du taux des D-dimères [35], aucune étude n'ayant encore clairement défini les zones de normalité en fonction du terme, et à plus forte raison la valeur seuil pour exclure un diagnostic d'embolie pulmonaire. Enfin, il convient d'interpréter avec précaution les taux de D-dimères dosés chez des patients sous traitements antithrombotiques (par exemple héparines ou antivitamines K). En effet, des résultats contradictoires sont rapportés dans la littérature concernant une éventuelle diminution, plus ou moins rapide après l'introduction de tels traitements, des taux plasmatiques des D-dimères [36-39], qui pourraient alors passer en dessous de la valeur seuil, entraînant par là même des conclusions erronées (exclusion du diagnostic d'embolie pulmonaire à tort).

Conclusion

Grâce à une excellente valeur prédictive négative (valeur prédictive négative supérieure à 98 %), le dosage des D-dimères s'inscrit aujourd'hui dans une stratégie diagnostique multidisciplinaire de l'embolie pulmonaire, limitant le recours aux techniques d'imagerie lourdes et plus ou moins invasives aux seuls patients ayant des taux de D-dimères supérieurs à la valeur seuil. Le développement de nombreuses trousses de dosage a permis de mettre en évidence un certain manque de standardisation. En effet, les discordances parfois observées entre les différents tests soulèvent un réel problème de standardisation. Il est vrai qu'il n'existe pas de standard international, ni d'unités internationales. Selon le système d'étalonnage du fabricant, les résultats sont rendus en « équivalant fibrinogène », ou en quantité de D-dimères. En l'absence d'un éventuel standard international, un spécimen de référence issu de pool de plasma avait bien été proposé par le Sous-comité scientifique et de standardisation (SSC) de l'ISTH, afin d'harmoniser les différents tests de dosage de D-dimères [40]. Ce n'est malheureusement pas encore le cas aujourd'hui, et une étude très récente a encore stigmatisé la très grande hétérogénéité des réactifs commercialisés tant en ce qui concerne leur sensibilité vis-à-vis des différents fragments de dégradation de la fibrine (liée à l'anticorps monoclonal utilisé) que la valeur absolue du résultat (liée à la calibration) ou la valeur seuil [41]. Cette hétérogénéité avait déjà été rapportée par les responsables du programme de contrôle de qualité européen Ecat (Leiden, NL) [42]. Ces réactifs ne sont donc pas interchangeables, et chacun doit être utilisé et calibré indépendamment des autres. De plus, ils doivent être validés par des études cliniques qui seules permettront de définir la valeur seuil optimale permettant l'exclusion du diagnostic d'embolie pulmonaire. Cette étape est critique, et il n'est pas exclu que la valeur seuil d'un réactif donné ne puisse être différente selon l'environnement technique de chaque laboratoire (instrument...), comme le suggèrent les recommandations d'un industriel pour son réactif.

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En conclusion, le dosage des D-dimères, par une technique performante sur le plan analytique et validée par des études biocliniques bien menées, peut faire partie intégrante de la stratégie diagnostique de l'embolie pulmonaire, voire plus globalement de la maladie thromboembolique veineuse. Un diagnostic d'embolie pulmonaire peut être exclu, avec une valeur prédictive négative supérieure à 98 %, en cas de taux de D-dimères inférieurs à une valeur seuil définie par des études prospectives sur des cohortes suffisantes de patients.

 

Annales de Biologie Clinique. Volume 59, Numéro 6, 693-700, Novembre - Décembre 2001, Revues générales

AVK et risques hémorragiques

Sang Thrombose Vaisseaux. Numéro 12, volume 6, 347-9, Juin - Juillet 2000, Editorial

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Auteur(s) : Ludovic Drouet, Jean-Noël Fiessinger, Bernard Boneu, Hervé Decousus

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Résumé : La classe thérapeutique des antivitamines K (AVK) fait actuellement l'objet de toutes les attentions. C'est une classe thérapeutique ancienne dont l'utilité et l'efficacité sont largement démontrées mais qui est toujours difficile à manier, malgré une prescription très large. En France, on estime que 400 à 550 000 patients sont traités par AVK chaque année, c'est-à-dire que, chaque année, 1 % de la population française reçoit ces médicaments aux effets secondaires potentiellement graves. Ce traitement apparemment très bon marché a le prix de la iatrogénicité. En France, environ 17 000 patients sont hospitalisés chaque année pour un accident hémorragique lié aux AVK : c'est la première cause d'hospitalisation pour accident iatrogène médicamenteux.

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Article complet  

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​Copyright © 2003 John Libbey Eurotext

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Mise à jour le 20 août 2016

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